Tokyo-Ga

Wim Wenders, 1985 (Allemagne, États-Unis)

Wenders est au milieu des années 1980 dans une période faste. Gratifié d’une Palme d’or l’année passée pour Paris, Texas, et avant de réaliser Les ailes du désir, le réalisateur allemand emmène sa caméra à Tokyo pour y déceler de possibles correspondances avec les films d’un cinéaste qu’il admire et l’influence, Yasujiro Ozu (1903-1963). La mégapole moderne ressemble-t-elle encore à ce que le maître japonais en a capturé à trente centimètres du sol avec son antique caméra ? Le centre nerveux urbain du Japon vu au printemps 1985 se souvient-il de ce qu’il était entre 1930 et 1960, années durant lesquelles Ozu filme ?

Des extraits de Voyage à Tokyo (1953) introduisent et bouclent Tokyo-Ga. Entre temps, Wim Wenders croise Chishu Ryu, l’acteur fétiche d’Ozu, Yuharu Atsuta, son principal caméraman et directeur de la photographie ; de même, Werner Herzog qui, dans un immeuble en verre, évoque la difficulté de trouver « des images pures » dans la ville géante ainsi que Chris Marker qui entre deux chats montre le coin de son œil.

En parallèle, Wenders déambule et montre la ville : ses axes routiers et ferroviaires (les trains traversent les films d’Ozu), ses lumières multicolores, l’ambiance des salles de pachinko. Il sélectionne d’autres aspects culturels : le baseball (sport apprécié là-bas, voir Jugatsu de Kitano, 1990), le golf sur le toit des gratte-ciel et le rock ‘n’ roll dansé dans la rue comme les Américains le dansaient dans les années 1950. Le Japon sous perfusion culturelle américaine directe depuis la fin des années 1940 qu’Ozu a commencé à connaître mais peut-être encore absente de ses films. Comme au cours d’une promenade dans un cimetière, Wenders rend hommage à Yasujiro Ozu, réfléchit au cinéma et aux images et fait de Tokyo-Ga, un essai cinéphilique, presque géographique, assez envoûtant.

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