Planète terreur

Robert Rodriguez, 2007 (États-Unis)

 

Faire une merveille à partir de bric et de broc n’est pas donné à tout le monde. Planète terreur, la deuxième partie du programme grindhouse concocté par Quentin Tarantino et Robert Rodriguez, n’est comparable à Boulevard de la mort que par son assemblage de pièces cinématographiques habilement reproduites autour d’un abracadabrantesque scénario. Pas plus. Contrairement à Tarantino qui s’accapare le genre (celui de ces séries B ou Z) et qui amène de la teneur à son œuvre, le réalisateur du Mariachi (1992) et de Sin City (2005) se contente d’une grotesque contrefaçon. Aussi dépourvue de relief soit cette planète, elle n’est pourtant pas si déplaisante. Certes, nous n’y passerions peut-être pas nos vacances, mais, l’espace d’une heure ou deux, la découvrir elle, ses monstres et leurs us s’avère somme toute assez divertissant. Robert Rodriguez accentue le grotesque des petits films qui l’inspirent : les créatures sont ultra sexy (Cherry la go-go danseuse interprétée par Rose McGowan) ou, à l’opposé, toutes de pus et de sang dégoulinants (les zombies, après s’être repus de chair fraîche et avoir vidé quelques crânes de leurs cerveaux crémeux, se font à leur tour dézinguer, trouer par des flingues de toutes tailles ou bien transformer en charpie par les pales d’un hélicoptère). Certaines répliques entendues cent fois et la plupart des lieux communs (la base militaire, le snack-bar isolé, les personnages de victimes comme la mère et son fils ou encore les soldats qui descendent de nulle part à l’aide d’une corde pour se faufiler derrière un personnage et le prendre par surprise…) nous renvoient aux séries américaines d’aventures des années 1980 et à leurs scénarios prémâchés (comme The fall guy / L’homme qui tombe à pic, entre 1981 et 1986 ou The A-Team / L’agence tout risque entre 1983 et 1987). Les monstres ridicules au corps atrocement boursouflé (le Dr. William Block joué par Josh Brolin, l’obscène soldat interprété par Quentin Tarantino et surtout le Lt. Muldoon campé par Bruce Willis) rappellent même les très méchants bonshommes affrontés indéfiniment par les shérifs de l’espace et autres héros de séries sentai (Uchû Keiji Gyavan / X-or ou Chôdenshi Bioman / Bioman pour citer deux célébrités, la première produite entre 1982 et 1983, la seconde entre 1984 et 1985). Toutefois, les ressemblances relevées entre Planète terreur et ces séries télé restent accidentelles et s’expliquent peut-être par leurs influences communes (?). Les références de Robert Rodriguez sont d’abord cinématographiques et grindhouse particulièrement. Mais au-delà de ce genre, Planète terreur emprunte aussi çà et là aux maîtres du fantastique. A John Carpenter (New York 1997 en 1981 et la suite réalisée quinze ans plus tard, Los Angeles 2013) : Snake Plissken transparaît dans le personnage de Wray (Freddy Rodriguez, qui n’est pas non plus sans nous rappeler, entre autres par son maniement des armes, Antonio Banderas dans Desperado, 1995), la bande-originale est typique de celles que composent Carpenter (un clavier ou une guitare, deux accords joués lentement), certaines ambiances sont semblables (la nuit, une personne seule au bord d’une route plongée dans le brouillard…). A George Romero, il emprunte bien évidemment le thème des zombies. Néanmoins, dans le scénario de Planète terreur, la réaction des individus agressés par ces assaillants en voie de décomposition est inverse à celle connue dans La nuit des morts-vivants (1968) : ils ne restent pas cloîtrés dans la baraque à attendre que les monstres approchent, ils sortent lourdement armés et canardent à cœur joie les pustulés. Robert Rodriguez s’amuse des incohérences qu’il sème dans son scénario, grossit le trait (l’humour n’est pas toujours très fin), tourne en dérision protagonistes, dialogues et actions (voir la très bonne bande-annonce introduite au début du film de Machete, le justicier mexicain). J’y ai d’ailleurs trouvé quelques similitudes avec un autre assemblage d’influences, La cité de la peur d’Alain Berbérian (1994). Cependant, à côté de Boulevard de la mort, Planète terreur manque clairement d’ambition. Mais Robert Rodriguez saurait-il faire de ses œuvres autre chose que des fac-similés ? Reste le divertissement, inégal selon les réalisations…

Une réponse à “Planète terreur”

  1. J’ai vu le film il y a quelques semaines et je me suis bien amusé vu que j’ai pris ce film au second degré. Dès les premières images (la fausse bande-annonce), on comprend que ce film va être une parodie totale.Tout est fait pour la franche rigolade. Malgré tout je suis d’accord avec toi quand tu dis que ce film reste largement inferieur à l’autre film grindhouse Boulevard de la mort de Quentin Tarantino, œuvre très incomprise lors de sa sortie.

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