Oro, la cité perdue

Agustín Díaz Yanes, 2017 (Espagne)

Une carte dressée par leurs prédécesseurs entre les mains, un groupe de conquistadors aux ordres de Charles Quint s’engouffrent dans la forêt amazonienne à la recherche d’une cité entièrement faite d’or. La troupe, qui se compose de soldats avides, d’un religieux fanatique, d’un scribe du roi et de la femme du capitaine, avance péniblement dans une végétation dense et un environnement hostile. Mais, deux mois durant, outre les serpents aux morsures mortelles, les caïmans ou même les attaques des indigènes qui défendent leur territoire, les Espagnols doivent surtout se protéger d’eux-mêmes.

L’idée même d’une cité d’or augmente déraisonnablement la convoitise de ces soudards. D’ailleurs tout a été calculé avant qu’ils ne sachent quoi trouver au terme de leur aventure. Chacun est censé obtenir sa part, l’empereur aura le cinquième du total. Mais bien sûr, à chaque mort, toutes les parts sont susceptibles d’augmenter… Alors les richesses promises montent à la tête au point que, au plus près du lieu à atteindre, les rapières percent à tout va. L’or n’est pourtant pas le seul point de discorde. La jeune épouse du capitaine (Bárbara Lennie) attire aussi les regards, notamment de deux guerriers qui n’auront de cesse de se provoquer, Martin Dávila (Raúl Arévalo) et l’imposant Alférez Gorriamendi (Óscar Jaenada). En dehors de l’or et de la dame, d’autres tensions préexistent. En effet, durant toute leur traversée de l’Amazonie, il se crée au sein du groupe d’explorateurs des sympathies par région d’origine (d’Aragon, d’Andalousie, d’Estrémadure…). Ces regroupements sont sources de médisances et de disputes. A cause de cela, certains sont choisis pour exécuter des tâches dangereuses, d’autres abandonnés ou assassinés… On se dit que là le récit prend des allures de parabole. Agustín Díaz Yanes écrit son scénario d’après un texte inédit d’Arturo Pérez-Reverte (romancier qu’il avait déjà adapté pour Alatriste en 2008). Mais le réalisateur ne glisse-t-il pas aussi quelque chose sur l’état de son pays aujourd’hui (plans d’austérité, détournement de fonds et crise du gouvernement Rajoy, crise catalane…) ? Avidité, rupture et folie.

Sans cela, Oro est un film d’aventure assez brute. Moins sensible que Le Nouveau Monde de Malick (2005) ou que The lost city of Z de Gray (2016), Oro doit probablement davantage à 1492 : Christophe Colomb de Scott (1992). On retient néanmoins l’idée que ces hommes perdus ne se lassent pourtant jamais de vouloir étreindre le mythe : la forêt vivante capable d’engloutir le profanateur, le récit d’un gynécée sylvestre, le monstre de la rivière, les tribus cannibales, l’Eldorado… La dernière scène, sur la plage, déplace même le mythe : « on raconte qu’en Chine… ». Un peu comme le final de Master and Commander de Peter Weir (2003), comme si tout ce jeu de massacres n’avait été qu’un jeu, comme si après l’or, un autre prétexte suffisait. Moins ludique toutefois que cynique.




3 commentaires à propos de “Oro, la cité perdue”

  1. Bonjour, j’espère que tu vas bien. J’étais parti voir le long-métrage « Oro, la cité perdue » au ciné à sa sortie. J’ai énormément aimé ce film dramatique du réalisateur Agustín Díaz Yanes.

  2. J’ai vu ce film hier soir sur Canalsat… Un beau film d’aventures , un peu touffu parfois, mais qui se laisse regarder. La fin, oui, est une sorte de parabole et, en fin de compte, n’étonne pas le spectateur.

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