La libertad

Lisandro Alonso, 2001 (Argentine)

La journée d’un bûcheron dans la pampa. Ce premier long métrage est filmé de façon brute, le plus souvent en longs plans séquences (le bonhomme coupe du bois, déplace du bois, entasse du bois…), en lumière naturelle, avec très peu de dialogues et sans musique. 73 minutes en tout. Dans La libertad, Lisandro Alonso nous donne le temps de nous rendre compte des conditions de vie de cet homme, au milieu de la brousse, dans sa cabane en tôle, de sa solitude et de sa précarité.

Le film est né d’une rencontre et non du sujet. Le jeune réalisateur vient de terminer ses études et trouve ce bûcheron, Misael, qu’il décide de suivre. Misael n’est pas vraiment un marginal, si ce n’est qu’il paraît totalement coupé de la vie urbaine. Ses seuls biens, néanmoins ceux qui ont une valeur marchande, sont ses outils de travail, une hache et une tronçonneuse. Le reste, vêtements, vaisselle, mobilier, relève d’une vie improvisée et d’une organisation de fortune. Cependant, en vivant de son activité, même partiellement, ce bûcheron se raccroche bien à un système. Il dépend d’un marché, puisqu’il revend ses tronçons de bois à un plus gros marchand, et l’argent qu’il gagne est dépensé. En outre, il entretient d’autres liens, aussi ténus soient-ils, avec un parent sûrement installé en ville, et des voisins agriculteurs qui lui prêtent à l’occasion leur véhicule.

Au final, on peine à croire en la liberté du personnage (la liberté du titre), mais peut-être davantage en celle du réalisateur. Film très modeste, avec une équipe technique que l’on image bien très réduite, sur un scénario calqué sur la vie d’un bûcheron faisant sa vie. Documentaire déguisé en fiction ou l’inverse, le film est aride. Le seul effet que se permet Alonso est de commencer et finir son film dans la nuit sur un même plan fixe et dans une drôle d’ambiance : le bûcheron qui a fini sa journée mange au couteau un tatou qu’il a attrapé et tué, face caméra, dans la lueur orange du feu, un orage grondant au loin (c’est peu dire que le coup du tatou, dans tout ce qu’il a d’étonnant pour le spectateur qui ne chasse ni ne mange du tatou fréquemment, nous sort de notre torpeur).

Lisandro Alonso est présenté comme « le plus grand cinéaste latino-américain actuel » (Atlas du cinéma 2009, dans les Cahiers du cinéma, juin 2009). Pourtant, avec La libertad, produit par Pablo Trapero (qui venait de réaliser Mundo Grúa en 1999 et que l’on connaît par exemple pour El clan, 2015), on doute un peu des intentions. Il reste cette évocation plus ou moins volontaire d’un travailleur indépendant sans l’être vraiment en pleine campagne sud-américaine. La journée d’un bûcheron dans la pampa.

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