Rosetta

Luc et Jean-Pierre Dardenne, 1999 (France, Belgique, États-Unis)

Elle est âpre et revêche Rosetta. Une fille qui ne se laisse pas aimer et qui ne veut rien devoir (jouée par Émilie Dequenne que l’on découvre dans son tout premier rôle ; elle a 17 ans et y est formidable). Une cousine de Mona (Sandrine Bonnaire dans Sans toit ni loi de Varda, 1985). Plus chanceuse malgré tout, bien que sa situation ne soit pas plus enviable : elle a pour adresse un camping sous la grisaille, se bat contre sa mère alcoolique et souffre de douleurs au ventre. Peut-être la rage qu’elle contient et qui éclate parfois, peut-être l’amertume trop forte et toute la bile ravalée par impuissance. Rosetta prête à tout pour un emploi, pour relever la tête et avoir une « vie normale » (la berceuse presque prière qu’elle murmure dans son lit et qui la réconforte probablement moins qu’elle ne lui évite de folles pensées ; Sandra jouée par Marion Cotillard se répète aussi qu’elle va bien devant son miroir dans Deux jours, une nuit, 2014). Elle va par conséquent jusqu’à trahir la seule personne à lui vouloir du bien pour prendre sa place et travailler pour un petit patron (Olivier Gourmet) dans une fourgonnette à gaufres. Enfermée, acculée, la dernière scène est un chemin de croix. La jeune fille accablée essaye de porter une bouteille de gaz. Harcelée par le garçon auquel elle s’est pris en croyant à sa survie, elle avance avec peine, l’instrument de sa mort sur les bras. Pourtant, au dernier regard qu’ils échangent, elle au sol épuisée, lui perd sa rancœur. Peut-être Rosetta doit-elle d’abord être capable d’accorder un peu de sa confiance à quelqu’un pour espérer relever la tête. Les Dardenne nous laisse là, sur un échange, rare et sincère.

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