Rencontre avec Joe Black

Martin Brest, 1998 (Etats-Unis)

Voilà un de mes films fétiches que j’avais vu lors de sa sortie en salles il y a tout juste dix ans et que je revois depuis régulièrement en dvd… Ce film a un charme fou et une atmosphère unique, je ne sais pas trop pourquoi précisément il m’a autant accroché, mais je ne me lasse pas de le voir et de le revoir, et c’est un récent visionnage qui m’a donné envie d’écrire quelques lignes à son sujet. Rencontre Avec Joe Black aurait très bien pu être une pièce de théâtre avec les thèmes éternels de l’amour, la vie et la mort, lesquels sont étroitement liés, dans la vie comme dans le film, et donnent ce côté quasiment shakespearien, classieux et remarquable.

Inspiré, plus qu’un véritable remake de Death takes a holiday (Mitchell Leisen, 1934), voici l’histoire en quelques mots : Bill Parrish (Anthony Hopkins), une personnalité importante du monde de l’édition et de la communication, est à la veille de son 65ème anniversaire dont une de ses filles, Allison, prépare activement les festivités en grandes pompes. Une nuit, alors qu’il a du mal à dormir et éprouve de violents lancements au cœur, il entend à plusieurs reprises une voix qui lui répète fermement « Oui ». Oui est la réponse à la question qu’il se pose depuis ses récents problèmes de santé : « vais-je mourir? ». La Mort en personne s’invite chez lui pour en apprendre plus sur ce bas monde… Ayant visiblement trouvé en ce grand Pdg un modèle d’exception. Mais le corps qu’a pris la faucheuse pour revêtir cette apparence humaine n’est autre que celui d’un beau jeune homme mystérieux (« incarné », et dans ce cas là le mot est bien adapté, par le séduisant Brad Pitt) pour lequel l’autre fille de Bill, Susan -visiblement sa préférée-, est tombée sous le charme le matin même dans un café new-yorkais. Sous fond de spéculations financières et d’Opa douteuse au sein de la société Parrish Communication, se joue alors un jeu de séduction, de complicité mais aussi de conflits et de tiraillements entre Joe Black, la Mort, Bill Parrish et Susan.

Les relations entre ces trois personnages symboliques donnent lieu à une triangulation dantesque finement mise en place : quand la Mort vient en apprendre plus sur la Vie, elle rencontre l’Amour… Un amour impossible. Mais il faut surtout, comme je viens de le dire, voir au-delà des personnages leurs propres symboles, et, dans l’entrelacement de leurs parcours respectifs, se dessine une fable romantique de toute beauté, haute en émotions.

La musique est vraiment sublime et donne ce caractère unique et mystérieux au film : elle parvient, avec seulement quelques notes de piano, à créer une ambiance qui restitue parfaitement les sentiments mêlés de peur de la mort, de l’inconnu, du mystère et d’un parfum d’éternité… Elle est vraiment en symbiose totale avec le thème du film.

Malgré ses trois heures, le film passe sans longueur : le rythme, parfois lent, donne ainsi tout le temps nécessaire à la progression du scénario et on se délecte de tant de finesse et de charme à chaque scène… Un véritable chef-d’œuvre selon moi.

Martin Brest a pour cela réuni un casting tout simplement parfait : Anthony Hopkins, en Pdg solide et attachant, défendant des valeurs telles que l’intégrité et la droiture, possède la carrure et cette autorité naturelle des grands personnages de ce monde. Peut-être son plus grand rôle à ce jour, selon moi. Brad Pitt, qui joue plus sur les nuances, est lui aussi extraordinaire dans la peau de ce Joe Black profond, mystérieux et déstabilisé par l’amour. A la fois fort et fragile, il prouve à nouveau son immense talent et en fera encore craquer plus d’un(e) dans ce rôle ! Claire Forlani est, elle aussi, sublime en jeune fille quelque peu réservée, timide et éperdument amoureuse de Joe Black. Leur scène d’amour près la piscine du superbe appartement new-yorkais de son père est d’ailleurs d’une beauté (magnifiquement filmé en plan rapproché) et d’un érotisme à toute épreuve. Même les rôles secondaires sont tous, sans exception, d’une justesse incroyable : Jake Weber (le personnage de Drew) est la parfaite tête à claques du petit homme d’affaires arriviste et sans scrupules ! J’adore comme il se fera moucher à la fin du film : « la mort et les taxes » (ceux qui l’ont vu comprendront !). Marcia Gay Harden joue à merveille le rôle d’Allison, la deuxième fille de Bill Parrish : visiblement affectée de ne pas être sa préférée, elle fera tout pour gagner son amour en se donnant à fond, par exemple dans la préparation des festivités dantesques de son 65ème anniversaire. Constamment à fleur de peau, elle incarne aussi de manière très juste ces Américaines embourgeoisées un brin hystériques ! On l’a vu récemment dans Into the wild de Sean Penn et aussi dans le superbe Mystic river de Clint Eastwood en 2003. Et enfin Jeffrey Tambor, qui joue le rôle de Quince, le mari de Susan, associé de Bill Parish : un homme simple, plus intéressé visiblement par le sport que par les affaires, à l’humour déconcertant (son amour trouble pour les petites filles révélé au détour d’une phrase par exemple !) et à la gentillesse un peu trop naïve, assez incompatible dans le monde de requins dans lequel il évolue. Il l’apprendra d’ailleurs à ses dépens… On le retrouvera bientôt à nouveau aux côtés d’Anthony Hopkins dans Slipstream, film mêlant humour et science-fiction réalisé par Anthony Hopkins lui-même, qui devrait sortir cette année.

Le réalisateur Martin Brest a tourné peu de films, mais c’est à lui que l’on doit Le flic de Beverly Hills en 1985, deux films avec mes chouchous De Niro et Pacino, l’excellent Temps d’un week-end (1993), Midnight run (1988), ainsi qu’Amours troubles, un film attachant avec Jennifer Lopez (comme quoi…), Ben Affleck et une apparition remarquée de -toujours lui- Al Pacino !

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