Pirates des Caraïbes, la fontaine de jouvence (On stranger tides)

Rob Marshall, 2011 (États-Unis)

 

Mes oreilles me trompent-elles ? Ou sont-ce bien les premières mesures de la Symphonie inachevée que Zimmer a glissé dans sa partition ? Devant la fontaine de jouvence, lorsque pirates et sujets de sa majesté s’apprêtent à mettre flamberge au vent, ces notes jouées par des cordes lugubres livreraient discrètement leur petit commentaire sur ce quatrième chapitre des aventures de Sparrow. Car s’il est question d’une symphonie inachevée, que je sois maudit par l’albatros si ce n’est celle de l’irrésistible Jack. Le capitaine Verbinski largué et sans rafiot après avoir noyé des nageurs confirmés par filet entier (cela d’un côté comme de l’autre de l’écran et sans 3D ; Jusqu’au bout du Monde, 2007) est remplacé fissa par le sieur Marshall à qui le spectacle sur planches n’est pas étranger (Chicago, 2003, Nine, 2010). Qu’importe la carte, le calice, la larme de sirène, « ce n’est pas la destination qui importe mais le voyage » (précepte qui ornait déjà le pavillon du Dead man’s chest). Toujours laissées inachevées (le réflexe d’un post-générique), ces aventures sont donc sans fin et, au buffet, pas une seule poire d’Angoisse, mais des choux à la crème.

Avec l’aqua vitae, la déferlante de mythes laisse sur la toile, à la place des squelettes et des poulpes (La malédiction du Black Pearl, 2003, Le secret du coffre maudit, 2006), une poignée de zombies et des sirènes frétillantes (Astrid Berges-Frisbey, Gemma Ward). Sur le gaillard d’arrière, Sparrow et Barbossa (Depp et Rush) font un peu de place à Edward Teach, plus craint sous le pseudonyme de Barbe Noire (l’insaisissable Ian McShane) et à sa soi-disant fille Angelica (la tempétueuse Penélope Cruz)*. De la même manière que Sparrow avait cédé le cœur de Davy Jones à Will Turner, il cède sa panacée à Angelica qui in extremis recouvre la vie. Encore une fois, peu importe l’objet, Sparrow est une légende qui se nourrit d’aventures pures. Pour l’heure, l’épopée ne souffrant plus de faiblesses passagères, nul besoin d’élixir de longue vie.

* Angelica qu’accompagnent Rodrigo y Gabriela de leurs guitares latines et dont les enchaînements d’accords sont de style parfois métal, ainsi sur Angry and dead again que l’on verrait tout à fait attaqué par les quatre archers d’Apocalyptica.

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4 commentaires à propos de “Pirates des Caraïbes, la fontaine de jouvence (On stranger tides)”

  1. Erreur ! Ne pas faire confiance à mes oreilles ou leur accorder un peu plus de temps à l’avenir, car ici point de Schubert mais du Berlioz ! Zimmer cite bien une mélodie connue mais extraite du Songe d’une nuit de Sabbat, ce qui s’accorde d’autant mieux que l’on assiste à un rite païen devant la fontaine.

  2. Je trouve ce quatrième opus fort intéressant, bien plus que les trois premiers, surtout après le deuxième et troisième qui sont à mon goût très ratés, proposant une intrigue qui ne tient absolument pas la route. Le film bénéficie d’atouts : un casting meilleur (au revoir Will Turner et c’est tant mieux), une réalisation plus inspirée et une intrigue plus claire et approfondie. J’espère que le cinquième soit dans cette même lignée !

  3. Deux ans après, il me reste moins à l’esprit de celui-ci que du très bon Dead man’s chest, plus sympa encore sur les ambiances que les autres volets (les poulpes et les orgues !) et s’il nous donnait les clés pour basculer dans la méta- aventure (proposition très stimulante), il gardait encore la tête sur les épaules, contrairement au voyage du Bout du monde (encore signé Verbinski ; mais a posteriori, peut-on en vouloir à ce dernier d’avoir voulu sortir des sentiers battus et tirer le fantastique jusque-là développé vers une ou deux séquences folles si ce n’est abstraites). Pour récapituler, je ne te suis nullement sur Pirates 2, mais te rejoints sur le suivant (quoique).

    Je n’ai pas regardé qui écrivait le cinquième épisode, ni si Verbinski avait gardé un droit de regard. Ceci dit, l’annonce des réalisateurs aux commandes du très gros vaisseau ne me dit rien qui vaille, ils seront donc deux, les Norvégiens Joachim Rønning et Espen Sandberg que l’on connait pour avoir fait Bandidas (2004)…

  4. Oui, l’annonce des réalisateurs inquiète, le choix de Rob Marshall était quand même honorable pour le quatrième opus. Il ne reste plus qu’à espérer que le talent de Javier Bardem qui campe le méchant camoufle les défauts techniques et artistiques…

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