Harvey Milk

Gus Van Sant, 2009 (États-Unis)

Harvey Milk fut le premier élu américain ouvertement gay dans les années 1970 en Californie. Son combat pour la tolérance et la cause de la communauté homosexuelle lui coûta la vie, mais en quelques années il changea profondément les mentalités et devint une véritable icône gay.

Pour l’incarner, Sean Penn, incroyable. Il parvient à rentrer véritablement dans la peau de Milk et à lui ressembler. Sean Penn est de toute façon un surdoué du septième art, que ce soit devant ou derrière la caméra, c’est incontestable. Arriver à passer avec autant de justesse de personnages aussi différents que le caïd de quartier Jimmy Markum (Mystic river, Clint Eastwood, 2003) à Willie Stark, homme politique aux ambitions démesurées (Les fous du roi, Steven Zaillian, 2006) puis au très efféminé Harvey Milk démontre tout son talent. Je tiens donc avant tout à saluer cet acteur d’exception qui a joué dans tant d’autres films majeurs : Nous ne sommes pas des anges aux côtés de De Niro (Neil Jordan, 1990), une nouvelle fois métamorphosé dans L’impasse aux côtés d’Al Pacino (Brian De Palma, 1994), La dernière marche avec Susan Sarandon (Tim Robbins, 1995), le film de guerre La ligne rouge (Terence Malick, 1999), Accords et désaccords (Woody Allen, 2000) ou encore L’interprète avec Nicole Kidman (Sydney Pollack, 2005)… La longue liste de ses rôles montre clairement qu’il est un acteur très complet.

Dans Harvey Milk, les second rôles sont tout aussi réussis en matière de jeu et de transformation : son protégé Emile Hirsch (le fameux Christopher McCandless d’Into the wild, 2008, bien sûr), James Franco (vu dans la trilogie Spider-man de Sam Raimi) ou encore Josh Brolin (Llewelyn Moss, le cowboy de No country for old men des frères Coen, 2008).

La reconstitution du San Francisco des années 1970 est impeccable. D’ailleurs le tournage a eu lieu là même où se sont déroulés les événements : dans le véritable appartement où a séjourné Harvey Milk et le décor du magasin photo « Castro Camera » a été construit à l’emplacement exact où se trouvait la boutique à l’époque ! Un perfectionnisme et un soucis du détail qui rend ce film très crédible, parfois proche du documentaire, ce qui n’étonne pas vraiment puisqu’il s’inspire librement du The times of Harvey Milk de Robert Epstein, Oscar du meilleur documentaire en 1985.

Gus Van Sant (qui avait ce projet en tête depuis les années 1990 !) s’est énormément investi et a mis tous les atouts de son côté pour réussir ce film dramatique et engagé, également tourné avec poésie et mélancolie. Porté par ses acteurs, Harvey Milk est un grand film.

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Une réponse à “Harvey Milk”

  1. Je n’y ai vu ni poésie, ni mélancolie.

    Le sujet est assez beau, la cause homosexuelle rendue visible par le combat d’un homme, Milk, à partir d’un quartier de San Francisco, le Castro devenu chef lieu de la communauté gay de la ville, puis dans l’Etat de Californie et dans le reste de l’Amérique des années 1970.

    Mais, à l’écran, pas forcément emballant. Gus Van Sant livre cette histoire assez sobrement, dans un grand souci de fidélité aux événements (il a pour conseillers ceux qui ont été des proches de Milk comme Cleve Jones ou Danny Nicoletta). La biographie est presque académique (flash-back après l’assassinat annoncé, chronologie respectée, panneaux en fin de film évoquant le devenir des protagonistes).

    Seul le dernier quart d’heure a davantage capté mon attention, lors d’une conversation entre Harvey et Scott, son ancien amant. Le montage alterne des plans du futur assassin, Daniel White (Josh Brolin), avec ceux de la future victime, Milk (Sean Penn), alors que le jour se lève. Un mouvement d’appareil évoque l’ascension de Milk qui monte les larges escaliers de la mairie, bâtiment blanc à colonnes et coupole, presque un mausolée. Le panoramique vertical est arrêté net par la course d’un homme, Dan White à l’arrière plan qui parcourt un couloir. La caméra le suit alors en un panoramique devenu horizontal comme la ligne de mort dessinée par un électrocardioscope.

    White vu de dos dans les couloirs de la mairie rappelle le lycéen qui déambulait dans les couloirs de l’école. Les meurtres du maire Moscone et de Milk dans ces locaux rappellent la tuerie de Colombine survenue en 1999 (Elephant, 2003).

    Avant de mourir, Milk fait face derrière sa fenêtre à l’opéra (que le spectateur voit par reflet) et aux affiches de la Tosca de Puccini dont il s’était ému peu de temps avant. Le réalisateur fait le parallèle (plusieurs airs sont entendus dans le film, nous voyons comme Milk spectateur le suicide de Tosca) et souligne ainsi la tragédie.

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